Le contexte coïncidait avec la polémique autour du principe de la parité homme-femme adopté au sein de la Haute instance indépendante pour la protection des objectifs de la révolution et la transition démocratique et qui ne s'est pas concrétisé au niveau des élections.
Nous avons invité Mme Mériem Sammoud, directrice exécutive, chargée des programmes au sein de la LET, à exposer les lignes directrices et la démarche de la LET, ainsi que les recommandations émises à la Constituante en matière de préservation des acquis et droits de la femme.
L'idée de rejoindre la société civile est due à une conjoncture politique où l'image de la femme semblait faire l'objet d'une controverse. Entre partisans et opposants, ses droits civiques et politiques, accumulés au fil des années, ont failli être confisqués.
Et son rôle en tant que partenaire à part entière dans la vie publique a failli être remis en question. Cinquante adhérentes se sont unies, se sont liguées, pour sensibiliser l'opinion sur l'importance du rôle capital des femmes dans le soutien de l'exercice électoral.
La vision que porte la LET à l'égard de la participation de la femme à la vie politique, telle que formulée par Mme Mériem Sammoud, se résume essentiellement dans l'espoir de vivre dans une société démocratique qui garantit l'égalité dans l'exercice du droit tout à la fois au vote et à la candidature. «C'est un premier pas sur la voie de la démocratie».
Aider la femme à exercer son droit de vote, tout en renforçant ses capacités à s'impliquer davantage, avec l'homme, dans tous les champs d'activité de la vie publique, c'est la mission principale que se sont assignées les adhérentes de la ligue.
En prélude à cette échéance, la LET s'était lancée dans une vaste campagne de formation en matière d'éducation électorale destinée à sensibiliser la femme, toutes catégories confondues, à prendre son destin en main, l'incitant à aller voter: dans le Cap Bon notamment, dans la capitale aussi et dans plusieurs régions rurales, un noyau d'électrices s'est donc formé pour agir dans une optique de proximité.
Il s'agissait de «leur expliquer comment et pourquoi voter, qu'est-ce que la Constituante et que signifie une constitution ?», souligne Mme Sammoud. «Notre activité consistait, entre autres, dans l'observation des opérations électorales. D'ailleurs, la LET était la première association à être accréditée par l'Instance supérieure indépendante des élections (Isie) en tant qu'observateur national », ajoute-t-elle. Depuis, environ 500 citoyennes ont participé aux deux meetings organisés par la LET avec les candidates en tête de liste.
En outre, un travail de réseautage a été mis en oeuvre, regroupant certaines parties concernées, à savoir «Thala Solidaire», «Zarzis Horizons» et «Femme et Citoyenneté» au Kef. La LET est aussi membre actif dans un collectif baptisé «Coalition des Femmes pour la Liberté et la Citoyenneté», aux côtés de l'association «Femmes Démocrates».
«Nous sommes aussi partie prenante dans un nouveau réseau lancé récemment, comportant dix associations, toutes engagées dans des actions en commun». Ce groupement associatif se veut, pour ainsi dire, un rempart face aux éventuelles menaces contre les acquis de la femme tunisienne.
«Mère, éducatrice ou responsable, la femme tunisienne ne cesse de se découvrir. Elle veut exceller partout», c'est une école de socialisation, où se transmettent des valeurs morales, de génération en génération. En cette phase transitoire, son apport doit être envisagé avec l'intérêt qu'il mérite. «Malheureusement, les femmes députées au sein de la Constituante ne font pas entendre nos voix auprès du gouvernement en place.
Elles n'expriment pas les préoccupations et les revendications de la femme de la rue», déplore Mme Sammoud. Le forum que vient d'organiser la Ligue des électrices tunisiennes, samedi dernier à Tunis, a été conçu en réaction à cette défaillance.
Mettre en contact direct les adhérentes de la LET avec leurs élues à l'Assemblée. Avec les représentantes de la Troïka, du Pôle démocratique moderniste (PDM), d'Al Aridha, du Parti démocratique progressiste (PDP) et de Afek Tounès. «Nous voulions, à travers cette rencontre, établir un pont de communication entre la société civile et l'ANC», ajoute encore Mme Sammoud.
Quels prolongements aura cette action au niveau de l'élaboration de la Constitution? Selon Mme Sammoud, l'égalité homme-femme est la pierre angulaire de tout édifice démocratique. Le principe de la parité, comme l'a défini la directrice exécutive de la LET, devrait se traduire dans les faits, à travers la participation politique et la représentativité électorale de façon verticale et horizontale (dans la même liste et entre les listes en lice). En outre, l'incrimination de la violence à l'égard de la femme s'avère être encore une question d'actualité et qui mérite donc d'être mentionnée dans la nouvelle Constitution.
L'Isie est au coeur des recommandations de la LET «Un acquis de taille auquel nous ne sommes pas prêtes à renoncer, bien plus, il s'agit pour nous de le défendre corps et âme pour en faire une haute instance indépendante et permanente des élections», renchérit-elle, estimant que sa continuité est une exigence démocratique.
A retenir aussi les recommandations à propos de la liberté de la presse et de l'indépendance de la justice que notre interlocutrice qualifie des deux poumons de la citoyenneté.
PAR KAMEL FERCHICHI, 6 FÉVRIER 2012
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